« Ma mère rit », avec ma fille, alors que ma mère, elle, ne rit pas du tout, alors que les nouvelles que j’ai d’elle ces derniers jours ne sont pas bonnes, ou encore moins bonnes que d’habitude. Avec ma fille, grande, 18 ans, assise à côté de moi qui aura un jour à dire, à penser, ou à faire, avec moi, ce qu’on entend dans ce texte troublant de Chantal Akerman.
C’est Natacha Régnier qui le lit. Seule, assise à un petit bureau au milieu de la scène, éclairée, elle et ses cheveux blonds sa chemise blanche et son pantalon noir, un peu comme un uniforme, et le noir tout autour.
Je ne sais pas dire la beauté d’un texte, ni le jeu d’un acteur: mais ce qui m’a touché, oui. Ce texte sobre et simple et dur, les moments où tout à coup j’ai les larmes aux yeux et je m’étonne que ce soit à ce moment là. Pourquoi, là? Et pas ailleurs.
Ma fille me demande à un moment « ça va? », et je la regarde aussi de temps en temps, pour voir si elle aussi, ça va.
« Quand on est soi-même fille d’une mère ayant une fille », on est doublement touché.
(« Ma mère rit », de Chantal Ackerman, mise en scène de David Strosberg, avec Natacha Régnier, au Théatre des Tanneurs. Vous pouvez encore y aller aujourd’hui.)